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Taux cohabitant : frein à la solidarité et entrave à la vie familiale

Analyse de l’arrêt de la Cour de cassation du 9 octobre 2017

En offrant une alternative pour réduire le coût du logement et de l’énergie, la colocation ouvre des perspectives de solidarité aux familles. Certaines familles monoparentales sont par exemple demandeuses d’un arrangement de ce type qui permet, en plus d’une réduction des coûts, de partager un projet de vie et de lutter contre l’isolement. Pour d’autres la colocation permet d’accéder à un meilleur logement ou tout simplement à un logement.

Ces projets de vie sont pourtant aujourd’hui inenvisageables pour les bénéficiaires de revenus de remplacement en raison du taux cohabitant.

Les familles devraient avoir le choix de leur forme d’habitat quels que soient leurs revenus. Le statut de cohabitant interfère avec cette liberté puisqu’opter pour une colocation peut conduire à une diminution importante des revenus de remplacement et parmi eux, des allocations de chômage.

En matière de droit au chômage, la notion de cohabitation est définie par l’arrêté ministériel du 26 novembre 1991 mais son interprétation fait toujours débat. Une foisonnante jurisprudence a notamment vu le jour au regard des pratiques de l’ONEM. L’Office national de l’emploi a en effet eu pour politique de considérer à priori les colocataires comme des cohabitant·e·s, sanctionnant pour fraude certain·e·s colocataires qui s’étaient déclaré·e·s isolé·e·s et les forçant à rembourser une partie des indemnités perçues.

En octobre dernier, la Cour de cassation a eu l’occasion de se prononcer sur la problématique. L’ONEM demandait à la Cour de casser un arrêt reconnaissant le statut d’isolé à des colocataires. La Cour a refusé de suivre l’argumentaire de l’ONEM et estimé qu’en l’espèce, il avait considéré les colocataires comme cohabitant·e·s à tort. Grâce à cette jurisprudence, l’ONEM semble reconsidérer sa position et publie en février 2018 une directive qui établit les critères et documents qu’il prendra en considération pour définir la catégorie familiale des colocataires.

Cependant, la charge de la preuve continue d’incomber à l’allocataire social·e. Il lui reviendra de prouver qu’il ou elle est bien dans les conditions de bénéficier du taux isolé ou de celui d’ayant charge de famille, avec le risque que seules les personnes les mieux informées puissent faire valoir leurs droits.

Le taux cohabitant tel qu’il existe est un frein à la solidarité mais il porte aussi atteinte au respect de la vie privée et familiale en entravant le choix des familles de mener le projet de vie qu’elles souhaitent.

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