Ce régime « définitif » est remplacé par une allocation temporaire pour inaptitude physique. L’objectif est de favoriser le retour au travail des agents de moins de 50 ans en maladie. Soit environ mille personnes par an.
C’est une fosse à oubli. » Cet endroit, c’est celui où tombaient, jusqu’à présent, les agents de la fonction publique qui, en raison d’un sérieux problème de santé (cancer, maladie chronique, etc.), se retrouvaient pensionnés pour inaptitude physique. Un régime sans retour en arrière possible pour des personnes contraintes de se débrouiller avec une faible retraite (reflet du petit nombre d’années de travail) sous peine de perdre leur droit à ce revenu de remplacement qu’ils ne pouvaient pas « compléter » au-delà de 1.215 euros brut par an. Un système que le gouvernement fédéral s’apprête à remplacer par une allocation temporaire pour inaptitude physique. Le point est à l’ordre du jour du conseil des ministres restreint de ce vendredi.
On le sait, le retour au travail des malades de longue durée est devenu un enjeu crucial dans la perspective d’atteindre un taux d’emploi de 80 % en 2030. Mettre tous les demandeurs d’emploi ne suffira pas et, au cours de cette législature, un parcours de retour au travail a été mis en place par le ministre fédéral de la Santé, Frank Vandenbroucke (Vooruit). Cela valait pour les salariés du privé. Avec ses collègues Petra De Sutter (Fonction publique) et Karine Lalieux (Pensions), il vient d’imaginer la même chose pour les agents de la fonction publique.
« Aujourd’hui, lorsqu’un fonctionnaire est mis en pension pour inaptitude physique, c’est définitif », rappelle Karine Lalieux (PS). « Il ne pourra plus retravailler, même partiellement, sans perdre ses droits et sans même bénéficier d’une allocation de chômage s’il y renonce. C’est une catastrophe pour la personne, la société et il n’y a aucune responsabilité de l’employeur. » Une situation dans laquelle se trouvent actuellement 87.000 personnes, rejointes chaque année par une cohorte de 2 à 3.000 personnes, dont un millier de fonctionnaires de moins de 50 ans. C’est à eux, principalement, que s’adresse cette réforme.
A partir du 1er janvier 2025 (pour peu que cette réforme puisse être approuvée au parlement avant l’ultime séance du 8 mai prochain), un agent confronté à une inaptitude physique recevra une allocation temporaire et plus une pension. Celle-ci restera le fruit de ses années de cotisation et sera complétée par une aide afin d’atteindre le montant de la pension minimum. « Ce sera désormais un droit individuel et plus soumis à la condition des revenus du conjoint », précise la ministre des Pensions.
L’agent et son employeur responsabilisés
Dès sa mise en maladie, la personne bénéficiera d’un suivi du Medex (où siègent les médecins-conseils) et sera accompagnée par un coordinateur de retour au travail (un budget de cinq millions par an est prévu pour les recruter). Sur la base d’un questionnaire préalable rempli par le travailleur, ce dernier évaluera la possibilité d’un retour au travail, dans la fonction initiale ou dans une autre. L’employeur (ici, une administration) sera responsabilisé car le lien statutaire avec le fonctionnaire subsistera tant qu’une solution à son dossier n’aura pas été trouvée ; il devra pouvoir démontrer qu’il a tout mis en œuvre pour permettre le retour de l’appointé et, dans le cas contraire, continuera à assumer le traitement de l’employé.
Le fonctionnaire, lui, pourra refuser si le poste proposé ne répond pas aux critères d’un emploi « convenable » ou si ce changement affecte sa rémunération. « Par contre, s’il ne coopère pas, son allocation pourra être suspendue », concède Karine Lalieux. Fameuse épée de Damoclès, tout de même. En cas d’impossibilité de retour, il conservera ses droits au chômage. Durant sa convalescence, l’agent pourra suivre une formation en vue d’une éventuelle reconversion, de même qu’il pourra travailler à temps partiel pour un revenu plafonné à 9.636 euros brut par an pour un isolé et 13.850 euros brut par an pour un ménage.
Karine Lalieux se félicite de cette réforme bâtie en concertation avec ses deux collègues, mais aussi avec les différents niveaux de pouvoir et avec les syndicats. Les entités fédérées devront néanmoins encore se prononcer au sein des comités A et B, notamment. Restera alors le passage au Conseil d’Etat, puis le vote au Parlement. Un timing serré pour une réforme « que les gouvernements précédents ont voulu mener sans y arriver ».