Persoverzicht

Persoverzicht

Statut de cohabitant·e : « Je suis gênée de demander de l’argent à mes enfants »

Onze verontschuldigingen, dit bericht is alleen beschikbaar in het Fr.

Patricia vit avec 800 euros d’allocation de chômage par mois parce qu’elle héberge son fils qui travaille. Une injustice aux yeux du PS qui dépose ce jeudi une proposition de loi visant à supprimer le statut de cohabitant qui concerne plus de 500.000 Belges. La démarche à toutefois peu de chance d’aboutir avant les élections.

Début de semaine compliqué pour Patricia à Blaton près de la frontière française. La quinquagénaire au chômage depuis mai dernier, et en arrêt de travail depuis près de deux ans, est revenue bredouille du CPAS. « J’ai voulu demander une prime énergie pour m’aider à payer ma facture de 579 euros de mazout. On me la refuse car je dépasse les plafonds alors que je touche 800 euros par mois. Ils m’ont demandé une composition de revenus qui indique que mon fils gagne 2.000 euros, mais ce n’est pas mon argent ! »

Comme plusieurs centaines de milliers de Belges (540.000 précisément), Patricia est impactée par le régime du statut de cohabitant. Il implique que les droits sociaux ne sont pas liés à chaque personne mais à la composition des revenus du ménage dans lequel il ou elle réside.

Aux yeux de l’Etat, Patricia vit donc théoriquement avec 2.800 euros (son allocation, additionnée au salaire de militaire de son fils), mais ce n’est pas sa manière de voir les choses : « Je ne vais quand même pas demander à mon enfant de payer un loyer ou de quitter la maison juste pour que je puisse toucher une allocation plus importante », se lamente celle qui était aide logistique en milieu hospitalier jusqu’à un burn-out. « Ce qui compte pour moi, c’est qu’il puisse économiser pour s’acheter une maison. Je suis gênée de devoir demander de l’argent à mes enfants mais pour payer la facture de mazout, je n’ai pas eu le choix. Je pourrais faire comme les autres et frauder, sauf que ce n’est pas dans ma mentalité ! »

Un coût « plus qu’acceptable »

Patricia estime être victime d’une « injustice » organisée par l’Etat. Une injustice à laquelle entend répondre le PS via une proposition de loi déposée ce jeudi à la Chambre. « C’est l’aboutissement d’un long combat qui s’est heurté à de nombreux blocages de la droite », détaille Ahmed Laaouej, chef de groupe des socialistes. « Ils disaient que supprimer le statut de cohabitant n’était pas finançable ou carrément impayable. Or, la Cour des comptes a estimé le coût à 1,9 milliard d’euros. Ce n’est rien en comparaison des 120 milliards du budget de la sécurité sociale ou des réductions de cotisations sociales de plusieurs milliards d’euros accordées sans compensation par le gouvernement précédent. Par ailleurs, nous proposons plusieurs pistes pour compenser cette dépense, comme la taxe sur les grands patrimoines. »

Dans la logique des socialistes : puisque l’argument du « coût » tombe, plus rien ne s’oppose à ramener « une égalité de traitement entre les assurés sociaux ». Tout le monde serait logé à la même enseigne et Patricia verrait son allocation remonter à environ 1.200 euros par mois. « Il n’est pas acceptable en 2023 d’être pénalisé financièrement parce qu’on vit avec quelqu’un », poursuit Ahmed Laaouej. « Par ailleurs, ce sont surtout les femmes qui sont victimes de ce système inégalitaire. En supprimant le statut de cohabitant, on rétablit une égalité entre hommes et femmes. On assure aussi une meilleure protection de la vie privée car il n’y aura plus besoin de contrôler la manière dont vous vivez. On peut même y voir un facteur de stabilisation économique : avec un pouvoir d’achat plus important, les gens consomment et soutiennent la demande intérieure. »

Promesse de campagne (bis ?)

Ce « combat » des socialistes était une promesse de campagne non concrétisée jusqu’ici. Elle ne fait pas partie de l’accord de gouvernement de la Vivaldi et les partenaires sont tous opposés à la mesure (lire par ailleurs), à l’exception d’Ecolo qui considère effectivement qu’il y a un « momentum » à saisir mais n’a pas déposé de texte à ce stade. Le point devrait revenir dans le programme des verts pour les élections de 2024.

Il y a donc peu d’espoir pour Patricia et les autres de voir leur allocation remonter sous cette législature. « Mon expérience parlementaire m’amène à dire qu’on ne peut jamais rien prévoir de ce qu’il peut se passer d’ici les élections », nuance Amhed Laaouej, qui n’envisage toutefois pas de majorité alternative avec le PTB ou d’autres partis d’opposition pour voter le texte. « Le PS se veut un facteur de stabilité au sein du gouvernement. Cela n’empêche pas de mener le débat. Il faut que les masques tombent. Comment peut-on dire que l’on se bat contre les inégalités et maintenir cette machine à précarité qu’est le statut de cohabitant ? Il faut être cohérent. »