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20 vertus à la suppression du statut de cohabitant.e

Une question de courage et de nécessité Politique !

Le Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté (RWLP) a rédigé 20 vertus à la suppression de ce statut de la honte qui appauvrit violemment.  Ces vertus sont aux bénéfices des urgences collectives et solidaires, de l’égalité dans l’application du respect de la vie privée, de la déontologie des professionnels, de la réduction des inégalités financières et immatérielles, au bénéfice de la reconquête du pouvoir de vivre et du droit à l’aisance.

La suppression de ce statut entraînerait :

  1. Une amélioration directe des revenus légitimes, insuffisants et souvent encore sous le seuil de pauvreté (même lorsque l’allocation est complète, faut-il le rappeler). Le rôle protecteur de la sécurité sociale serait ainsi pleinement rempli. Le rôle résiduaire du CPAS contribuerait davantage à une possible sortie de la pauvreté qu’à un maintien dans le trop peu.
  2. Un évitement des situations de privation dramatique de revenu pendant des semaines, voire des mois, durant les périodes de transitions administratives liées à des transitions de vie qui peuvent être terriblement appauvrissantes ; une telle privation peut d’ailleurs tenir à des litiges entre les acteurs de l’Etat et les personnes précisément à propos de ce statut (nous pensons ici aussi aux complexes et lourdes procédures administratives qui pèsent sur les personnes et qui engorgent aussi la justice) ; tout cela peut aussi générer un endettement naissant ou aggravé, une perte de logement, etc., préjudiciables à toutes les parties concernées.
  3. Une simplification en matière d’application des droits ET une réduction très importante du non-recours aux droits. Faut-il rappeler que la complexité de l’application de ce statut suscite l’incompréhension des citoyen.ne.s et parfois même la mise en difficulté des professionnels qui ont à appliquer le droit ? Nous assistons régulièrement à des pratiques protectrices compréhensibles d’auto-non-recours à d’autres droits dans le chef de celles et ceux qui sont contraints de construire un improbable équilibre de survie malgré ce statut cohabitant, et à des attitudes de défiance voire de rejet envers des services et la société en général.
  4. Une contribution à la rencontre du défi du vieillissement via la multiplication des expériences intergénérationnelles, positives à la fois pour le bien-être des gens et pour la sécurité sociale.
  5. Une contribution et un soutien aux choix et expériences améliorant la santé mentale sans recourir à des institutions qui ne sont pas toujours nécessaires ou appropriées, mais sont toujours très coûteuses.
  6. Une forte contribution à une stratégie politique d’éradication du risque et de la réalité du sans-abrisme (sans chez-soi) en offrant l’opportunité d’une vie collective lors de la sortie d’institutions (de détention et de prison, de maison d’accueil, d’hospitalisation longue en santé mentale le plus souvent, d’institution résidentielle d’aide à la jeunesse), de la rue, de ruptures familiales majeures, dans le respect du souhait de la personne.
  7. Une participation dans les faits et non dans les annonces à la lutte contre l’appauvrissement et la pauvreté des femmes ; nombre d’entre elles tombent sous le coup et la coupe des effets de ce statut dans le cadre de parcours de vie professionnelle particulièrement instables (temps partiel, carrière coupée, etc.)
  8. Un apport majeur dans la lutte contre l’appauvrissement et la pauvreté des jeunes, qu’ils soient aux études ou pas, alors qu’il est nécessaire qu’ils puissent être soutenus dans ce moment clé de leur vie, sans oublier que certains jouent aussi un rôle de soutien occasionnel à leur propre famille ou fratrie
  9. Un levier fort pour éviter, réduire, éliminer la maltraitance (morale, verbale, physique, liée à la privation) envers les femmes, les jeunes adultes, les personnes âgées, maltraitance produite par des conditions de vie violentes dues à l’insuffisance de revenus, plaçant les familles dans des situations de surcharge de bouches à nourrir et les exposant à des éclatements familiaux très douloureux qui entraînent des conséquences coûteuses pour la sécurité sociale, les aides sociales et dans tous les champs sociétaux.
  10. Une aide précieuse à la prévention naturelle (prévention générale) qui devrait prévaloir à toutes politiques publiques, pour soutenir et non soumettre à une épreuve de plus des jeunes, des personnes, des familles confrontés à des réalités et combats de vie suffisamment complexes. Nous pensons à la perte de ressource financière que constitue ce statut à travers des droits dérivés, des aides sociales comme par exemple l’allocation entretien détenu (déjà totalement indécente sans l’application du statut cohabitant) pour les personnes qui portent un bracelet électronique
  11. Un temps juste et adapté pour se soigner, évitant ainsi une reprise prématurée d’un travail pour cause de diminution des indemnités appauvrissant la personne ou le ménage alors que la personne n’est pas encore en état pour se relancer dans la vie professionnelle. La sécurité sociale retrouverait pleinement son rôle protecteur.

En gagnant cette suppression du statut cohabitant :

  1. Nous nous attaquerions, il n’en est que temps, aux impacts collatéraux dramatiques qui conduisent des enfants à transformer l’explication de la réalité dans laquelle ils vivent, ou à la cacher, pour protéger leurs parents d’une révélation qui leur porterait préjudice : quelle éducation notre société leur dispense-telle ainsi.
  2. Nous ne serions plus complices de la privation délétère pour tant de nos semblables d’une vie amoureuse construite en toute quiétude et en permanence sous le même toit, ou du recours contraint à une fausse adresse domiciliaire, avec la peur permanente du contrôle et du risque de l’injuste sanction.
  3. Nous développerions des réponses solidaires à la pénurie de logements ; le logement en tant qu’élément central d’une vie digne est malheureusement un droit de plus en plus bafoué vu son aspiration de plus en plus forte dans la logique violente du marché ; nous apporterions du même coup une contribution « naturelle » au combat contre les peu scrupuleux marchands de sommeil qui trouvent grâce à l’application de ce statut cohabitant des proies faciles à exploiter ; et indirectement nous contribuerions concrètement à répondre aux enjeux climatiques en apportant cette pierre à l’édifice d’un Pacte logement-énergie vital pour les personnes et pour la vie sur terre.
  4. Nous permettrions le retour aux fondamentaux de leur travail, pour les travailleurs sociaux qui le demandent avec tant d’insistance : un accompagnement de qualité, dans la durée si nécessaire, et non mâtiné d’un contrôle qui produit une inévitable perte de confiance envers les professionnels et envers la prégnance de l’intérêt général qu’ils incarnent.
  5. Nous obtiendrions, et ce serait loin d’être négligeable, une (re)diminution des demandes d’aide sociale aux CPAS, ce qui permettrait à la sécurité sociale protectrice de jouer pleinement son rôle et aux CPAS de retrouver le chemin de l’aide résiduaire. L’augmentation du déplacement des demandes vers les CPAS constituant un déplacement de la charge de la solidarité vers les communes.
  6. Nous renforcerions un meilleur et plus juste respect de la vie privée, surtout pour les ménages fortement vulnérabilisés et les allocataires sociaux dont la vie est surexposée de multiples manières à des violations de l’intimité.
  7. Nous contribuerions au vivre ensemble en évitant la mise en concurrence des populations, l’esprit de surveillance et de délation, les jugements péremptoires, la dynamique du bouc-émissaire. Car si ce statut cohabitant appauvrit davantage les pauvres, il appauvrit aussi les jeunes, les femmes, personnes âgées et familles de la classe moyenne qui rament ou frappé.e.s par un accident de la vie dont elles.ils se croyaient protégé.e.s. Ce statut n’est légitime pour personne.

Et des raisons impératives de le supprimer :

  1. Comment ne pas voir dans la suppression de ce statut, un premier levier au service du renforcement de la sécurité sociale, à savoir jouer plus fortement encore son rôle protecteur et de justice sociale au bénéfice de l’ensemble de la population à toutes les étapes de la vie. La sécurité sociale est le dispositif solidaire le plus précieux que nous ayons. Elle le démontre encore plus visiblement au fil des crises successives, Ne pouvant devenir une variable d’ajustement, elle doit être défendue, consolidée, renforcée et améliorée. Inutile d’aller inventer d’autres dispositifs lorsque ce merveilleux véhicule peut contribuer rapidement à rencontrer les enjeux énoncés au bénéfice des jeunes, des familles, des personnes âgées, des personnes vulnérabilisées, des personnes souffrant de déficiences, de la vie collective, de la solidarité et de la planète. Si tout doit être fait pour que la sécurité sociale reste et (re)devienne le premier dispositif protecteur, le combat serait actuellement injuste s’il n’emmenait dans son sillage la suppression du statut cohabitant aussi dans le cadre des droits dérivés, des aides sociales diverses, dont le revenu d’intégration sociale
  2. Et si supprimer le statut cohabitant était considéré comme un investissement, et qu’au final il finirait par rapporter complémentairement, financièrement, solidairement, démocratiquement et en termes de paix sociale, à l’Etat et donc à tout le monde ? Et si les bénéfices financiers directs se faisaient ressentir dans la vie économique directe des ménages, la réduction d’un surendettement, le budget des communes, et donc aussi des caisses de l’Etat par la TVA et autres formes de contributions ou non-dépenses ? Et si la santé des gens était meilleure, si les métiers du contrôle/sanction n’étaient plus nécessaires, si les logements étaient mieux habités et rénovés, si moins de personnes vivaient dans des institutions collectives lorsque ce n’est pas le moment, si moins de personnes étaient à la rue ? Et si les travailleur.euse.s du social et leurs institutions s’en portaient mieux ? Si la prévention prenait le pas sur le curatif plus que très coûteux ? Bref si cela participait à ne plus jeter l’argent et les gens par les fenêtres mais à investir au bénéfice de la population ?